Quel est le point commun entre la faillite de la banque d’affaire Lehman Brothers et la centrale nucléaire de Fukushima ? A priori, aucun. Et pourtant, comme le fait remarquer le journal économique La Tribune, il y a, dans ces deux drames, une même racine du mal : la croyance aveugle dans l’innovation !
Pour Lehman Brothers, c’est, au départ, la croyance dans l’innovation financière, une innovation qui était parée effectivement de toutes les vertus et qui devait permettre à des ménages américains sans le sou de s’endetter pour s’offrir leur maison. On sait que cette croyance dans l’innovation financière s’est terminée par la crise dessubprimes, qui a failli emporter l’économie mondiale avec elle.
Du côté de Fukushima, on a découvert ou redécouvert que l’industrie nucléaire avait progressé sur une promesse : l’accès à une énergie bon marché, illimitée et «écologique», si je puis dire. Le désastre de ces dernières semaines a démontré qu’en matière d’écologie, il faudra repasser…
Dans ces deux cas, que s’est-il passé ? Financiers et ingénieurs se sont basés sur des modèles mathématiques et informatiques censés prévenir les risques. Dans les deux cas, la population s’est rendu compte – à ses dépens – que ces modèles, aussi sophistiqués soient-ils, ne sont valables que pour 99 % des cas. Il y a toujours le pour cent que personne ne peut prévoir. Ce que le philosophe et ancien trader libanais Nassim Taleb appelle le «cygne noir», ce fameux pour cent d’imprévisible.
Comment pouvait-on s’attendre à la faillite de Lehman Brothers, une banque vieille de plus de deux siècles et ultra-puissante, au point que personne ne pensait qu’on la laisserait tomber en faillite ? Erreur fatale… Comment la centrale de Fukushima pouvait-elle se préparer à affronter une vague de 14 mètres, alors qu’aucun tsunami n’avait dépassé les 10 mètres ?
Le pire, c’est que, dans les deux cas, les autorités de contrôle ont ensuite proposé de faire des tests de résistance, histoire de nous rassurer. En Europe, on l’a fait pour les banques, y compris irlandaises. Les mêmes banques irlandaises qui ont réussi ces tests et qui, voici quelques mois encore, ont dû être nationalisées en catastrophe, sans quoi elles tombaient en faillite.
Autant dire que ces tests de résistance étaient du bidon. Aujourd’hui, on nous promet de faire les mêmes tests de résistance avec les centrales nucléaires. D’où la question : seront-ils vraiment fiables ? Ou va-t-on nous endormir, comme on l’a fait avec les tests de résistance bancaire ? La question reste posée.