Le Soir Samedi 31 mars et dimanche 1er avril 2012
L’AVIS DE MARC COUDRON
« On a arrêté la mixité »
A quand remonte cette mutation ? Elle a commencé
quand l’équipe masculine s’est qualifiée pour la Coupe du Monde de 94. Mais on
était avec une équipe qui n’avait ni le talent, ni le courage, ni l’engagement
de ce qu’on a maintenant… Le véritable boom a commencé avec la génération 2000
des Maxime Luyckx, Xavier Reckinger, Thomas Van Den Balck… Ils ont été aux JO
de 2008 et ont un peu bousculé le paysage. Ils étaient talentueux mais aussi
très travailleurs. L’aide du COIB, à partir de 2004, a aussi beaucoup apporté.
Et chez les filles ? En 2008-2009, elles
n’évoluaient encore qu’en coupe d’Europe B. Avec des filles super motivées on
peut aller vite, mais on ne pensait pas que ça se passerait comme ça aussi
rapidement. Quand je les ai vues lors des préparations en Afrique du Sud ou en
Espagne, j’étais convaincu qu’elles allaient se qualifier.
Comment expliquer le boom du hockey ? Le déclic,
c’est quand on a arrêté la mixité des équipes jeunes en 2000. Depuis, le nombre
d’inscriptions féminines a véritablement explosé. On est passé de 1.500 filles
sur un total de 13.000 à plus de 10.000 sur un total de 27.000. Depuis quatre
ans, les filles et les garçons bénéficient de la même qualité d’encadrement. Puis,
je crois que beaucoup de parents ont envie de mettre leurs enfants dans un
sport qui a des valeurs de respect, de fair-play, de convivialité, d’esprit
d’équipe… Ils savent aussi qu’ils ne les y mettent pas pour qu’ils deviennent riches.
Le défraiement dont bénéficient les filles de l’équipe nationale, c’est pour
rire (entre 400 et 700 euros par mois). Et encore, avant c’était rien du tout. PH.DB.
Pour en
finir avec
les idées reçues…
Pour celui qui n’a jamais mis
les pieds au bord d’un terrain, tout hockeyeur est un « péteux » d’Uccle qui
parle comme le Gonzague de Richard Ruben, roule en allemande, lit La Libre le lundi et fréquente le
golf du Zoute. L’explosion du hockey et ses exploits à répétition finiront par
avoir raison de ces clichés.
Le hockey est
un sport de riches. Faux.
Le fait est qu’historiquement, le hockey s’est développé au sein de clubs de
tennis très huppés et fréquentés par la noblesse et la haute bourgeoisie à l’image
du Léopold, le club le plus titré. Mais résumer aujourd’hui le hockey au
triangle doré ucclois Léopold-Racing-Wellington est une erreur même si
Brasschaat, Waterloo ou Woluwe sont socialement comparables. Le hockey suit le
même chemin, avec quelques décennies de retard, que le tennis dont plus
personne ne prétendra qu’il ne s’est pas démocratisé. On ne passe pas en 15 ans
de 10.000 à 28.000 membres juste avec les nobles et les capitaines d’entreprises
! La cotisation n’est d’ailleurs pas plus chère que dans les autres sports (200
à 400 euros).
Le hockey est
un sport bruxellois et francophone. Faux. Longtemps, le hockey a été l’affaire des Bruxellois – et des
francophones de Flandre (Gantoise, Beerschot). Dans les années 70, la rivalité Léopold-Uccle
Sport a donné une image de sport 100 % ucclois. Les choses ont bien changé. Le
Dragons (Brasschaat) est le club le plus titré des 20 dernières années.
Surtout, la répartition des forces a totalement changé au sein de la seule
fédération unitaire avec le foot : sur les 28.000 membres, 8.000 seulement jouent
en fait à Bruxelles, 6.000 en Wallonie et 14.000, la majorité, dans des clubs
flamands, modernes et compétitifs. Dans le top 10 des plus grands clubs de Belgique,
dominé par l’Orée (1.101 membres), cinq sont anversois (Antwerp, Braxgata,
Dragons, Victory, Herakles), trois sont bruxellois et deux proviennent du
Brabant wallon.
Le hockey est
un sport de salon. Faux.
Le sport pratiqué jadis sur gazon par de menus Indiens a changé d’âme avec les
terrains synthétiques. Aujourd’hui, les athlètes allemands, néerlandais et
australiens ont fait de ce sport un des jeux les plus physiques et rapides qui
soient et, pour s’y faire une place, les Belges ont dû se plier aux lois du
genre avec l’appui de techniciens étrangers.
Le hockey est
un sport masculin. Faux.
En 1995, 1.500 des 13.000 affiliés seulement étaient de sexe féminin. Dix-sept ans
plus tard, la proportion est passée à 36 %puisqu’aujourd’hui 10.000 joueuses émargent
à ce sport, contre 18.000 joueurs. La fin des équipes mixtes chez les jeunes a
libéré les filles. Le hockey est sans doute le sport collectif le plus féminin.
La hockeyeuse est-elle l’avenir du hockeyeur ? Aux Pays-Bas, première nation féminine
(et 3e masculine) mondiale, 131.000
des 227.000 hockeyeurs sont des hockeyeuses !
Le hockey est
un sport familial et à valeurs. Vrai et archi-vrai. C’est sans doute pourquoi ce sport attire les
déçus du football et de son ambiance délétère y compris chez les plus jeunes.
En fait, pour beaucoup, le hockey est le sport le plus proche des idéaux olympiques
des origines. ■ JEAN-FRANÇOISLAUWENS
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