USA/MF Global: une onde de choc bien loin du séisme Lehman
New York (awp/afp) - Le dépôt de bilan du courtier MF Global, tout en semant la pagaille dans les échanges de matières premières, a été accueilli avec un relatif flegme sur les marchés, loin de l'onde du séisme qu'avait provoqué il y a trois ans la chute de la banque Lehman Brothers.
Aussitôt lancée la faillite de la société, l'un des premiers courtiers en produits dérivés dans le monde, les plateformes d'échanges lui ont retiré le droit de procéder à toute transaction.
Résultat: les comptes des clients de MF Global ont été immédiatement gelés. Ses courtiers ont vu leurs ordinateurs et leur accès aux salles de marchés bloqués. D'autres opérateurs, qui faisaient appel aux services de compensation de la firme, ont dû rentrer chez eux, l'entreprise n'étant plus en mesure d'enregistrer leurs ordres, a rapporté le Wall Street Journal.
Sur les plateformes du CME, géant des produits dérivés qui regroupe les marchés de l'énergie à New York, agricoles et obligataire à Chicago, le volume des échanges physiques a été presque deux fois plus faible lundi que vendredi.
8E PLUS GROSSE FAILLITE DEPUIS 1980
Mais si la chute de MF Global, qui représente la huitième plus grosse faillite enregistrée aux Etats-Unis depuis 1980, a semé le trouble dans les milieux financiers, elle n'a eu qu'un impact limité sur les marchés, bien plus secoués par l'annonce d'un référendum en Grèce sur le plan européen.
"MF Global ne présente clairement pas de risque systémique, mais le fait de voir que trois ans après la faillite de Lehman, il reste des zones d'ombre dans le système financier fait un peu peur", reconnaît une source dans la salle de marché new-yorkaise d'une grande banque européenne.
"On n'avait pas vu venir Dexia", la banque franco-belge démantelée en octobre, "et là on n'avait pas vu venir MF Global", poursuit cette personne ayant requis l'anonymat. "C'est une énième démonstration qu'on ne sait pas où est le risque, on ne sait pas quel est le maillon faible. La crainte d'un effet domino commence à circuler sur les marchés".
LEHMAN DANS TOUS LES ESPRITS
Même si la faillite de Lehman Brothers en septembre 2008 vient à tous les esprits, les deux sociétés ne présentent pas la même envergure, ni la même variété d'activités. Les actifs de MF Global sont estimé à 41 milliards de dollars, contre 691 milliards pour Lehman au moment de son effondrement.
Les régulateurs de marchés américains, la SEC et la CFTC, ont assuré lundi avoir suivi de près l'évolution de la situation du courtier new-yorkais et jugé qu'un dépôt de bilan était l'option "la plus sûre et la plus prudente".
"Heureusement, MF est une grosse société, mais pas trop grosse, elle ne présente donc pas les mêmes niveaux d'interactions que si on avait un problème à Goldman Sachs ou Bank of America", estime James Angel, professeur de finance à l'université de Georgetown.
Pour autant, selon l'expert, "la question de la contagion se pose".
"La question, quand on pense aux énormes pertes causées par une faillite, c'est de savoir qui sont les créanciers qui vont le plus souffrir. Je pense que tout le monde dans les salles de marché essaye de le savoir", explique-t-il.
VALEURS BANCAIRES EN RECUL
Selon le dossier du dépôt de bilan, les plus importants créanciers de MF Global sont JPMorgan Chase et Deutsche Bank, mais ils agissent au nom d'autres établissements financiers et il est donc difficile de savoir qui détient quoi dans la dette.
Pour James Angel, la faillite du courtier rappelle aussi les risques que fait peser la crise européenne sur le système financier de la planète.
Les valeurs bancaires chutaient mardi à Wall Street, notamment Morgan Stanley, la banque réputée la plus exposée à la dette publique de la zone euro, mais aussi le groupe de services financiers Jefferies, qui a assuré mardi qu'il n'avait "pas d'exposition significative à la dette souveraine du Portugal, de l'Italie, de l'Irlande, de la Grèce et de l'Espagne", au lendemain d'un plongeon de plus de 10% de son action.
rp
MF Global n'a pas séparé les comptes clients de ses comptes
01-11-11 à 17:01
Le dépôt de bilan du courtier MF Global Holdings, qui fait l'objet d'une enquête des autorités américaines de régulation, faisait sentir ses effets mardi sur les marchés à terme du monde entier. /Photo prise le 31 octobre 2011/REUTERS/Brendan McDermid (c) Reuters
CHICAGO (Reuters) - MF Global Holdings, le courtier de dérivés qui a déposé son bilan lundi, a omis de distinguer les comptes de la clientèle de ses propres comptes, a déclaré mardi son autorité de tutelle.
"Le CME a trouvé que MF Global n'était pas en conformité avec la Commodity Futures Trading Commission et les obligations de séparation des comptes clients du CME", a déclaré Craig Donohue, directeur général de CME Group.
Ne pas faire une telle distinction constitue une infraction aux règles de conduite des courtiers de futures (contrats à terme) et les déclarations de Donohue soulèvent des questions à propos d'autres, formulées encore vendredi par le CME et d'autres marchés suivant lesquelles MF Global restait une contrepartie fiable.
"Il y a toujours un risque pour le client de supporter les pertes d'autres clients dans le propre compartiment de la clientèle", a dit Donohue à des investisseurs. "Il y a toujours le risque aussi que les fonds de la clientèle ne soient pas protégés de manière adéquate".
Dans le même temps, le cabinet comptable KPMG, nommé administrateur judiciaire pour les opérations de MF Global en Grande-Bretagne, a fait savoir qu'il faisait le maximum pour clore les positions de la clientèle et s'est dit confiant de voir celle-ci récupérer ses fonds.
"Il s'agit encore de grosses sommes. Il s'agit encore de milliards", a dit à Reuters Richard Fleming, responsable restructurations chez KPMG, ajoutant qu'il ne savait pas encore quand la procédure serait achevée.
En déposant le bilan lundi faute d'être parvenu à un accord sur des cessions d'actifs, le courtier est devenu la première victime américaine d'envergure de la crise européenne de la dette. (Voir )
Ce dépôt de bilan fait désormais l'objet d'une enquête des autorités fédérales américaines, qui tentent de déterminer si MF Global a détourné des fonds appartenant à ses clients pour soutenir ses activités en compte propre dans ses derniers instants d'existence, révèle le New York Times.
S'appuyant sur des sources au fait du dossier, le New York Times explique que des centaines de millions de dollars appartenant à des clients de MF Global ont disparu ces derniers jours, sans qu'on sache si cela résulte d'un détournement ou de la simple désorganisation du groupe en plein effondrement.
Initialement, jusqu'à près d'un milliard de dollars avait disparu des comptes du groupe, mais une fois son dépôt de bilan annoncé, le chiffre était retombé sous les 700 millions de dollars, détaillent les sources du quotidien.
AMPLEUR DE L'INFRACTION INDETERMINÉE
Dans un communiqué publié lundi soir, la Securities and Exchange Commission et la Commodity Futures Trading Commission américaines ont fait savoir que les régulateurs surveillaient MF Global en anticipation d'une transaction "qui comprendrait le transfert de comptes clients vers une autre firme".
Selon une source proche du dossier citée par le New York Times, il est probable qu'une partie des sommes soit détenue par des banques qui hésitaient la semaine dernière à les confier à MF Global, mais le courtier devra alors en fournir la preuve.
Donohue a dit pour sa part que le CME examinait ce qui avait pu se passer précisément chez MF Global et ne pouvait rien dire pour l'instant sur l'étendue de l'infraction.
La chambre de compensation LCH.Clearnet a déclaré MF Global en défaut lundi, quelques heures seulement après avoir dit que le courtier restait l'un de ses membres actifs.
CBOE Holdings a de son côté restreint les échanges des clients de MF Global à la seule liquidation de leurs positions sur ses plateformes, le Chicago Board Options Exchange, le C2 Options Exchange et le CBOE Futures Exchange.
L'OCC (Options Clearing Corpotation) américaine a enfin annoncé mardi qu'elle suspendait MG Global.
Pour les intervenants du marché, la chute de MF Global rappelle la faillite de Lehman Brothers à l'automne 2008, mais son impact devrait être bien plus limité, le bilan du courtier, à 41 milliards de dollars, représentant moins d'un dixième de celui de Lehman.
"Si ceci n'est pas un Lehman Brothers, les gens deviendront plus prudents parce qu'ils redoutent qu'il puisse y avoir un autre MF Global", dit Ang Kok Heng, de Phillip Capital Management en Malaisie, rappelant que les courtiers restent plus exposés aux faillites que les banques.
"Les banques ont les banques centrales pour garantir leurs dépôts, tandis que les brokers n'ont pas ce genre de soutien."
Ann Saphir, Natalie Huet et Wilfrid Exbrayat pour le service français, édité par Matthieu Protard
Crise: emplois supprimés et première faillite, l'horizon nuageux de la finance
Publié le 01.11.2011, 14h45
L'emballement de la crise financière, attisé mardi par l'appel grec au référendum sur l'accord européen et la panique boursière qu'il entraîne, pousse les banques à licencier en masse, et a fait une première victime de taille aux Etats-Unis, le courtier MF Global.
Ce dernier, un leader sur les matières premières et produits dérivés, était sur la sellette depuis l'été, après avoir reconnu être exposé à hauteur de 6,3 milliards de dollars à la dette publique européenne, dont une majorité de titres des pays périphériques, Italie et Espagne.
Ce dernier, un leader sur les matières premières et produits dérivés, était sur la sellette depuis l'été, après avoir reconnu être exposé à hauteur de 6,3 milliards de dollars à la dette publique européenne, dont une majorité de titres des pays périphériques, Italie et Espagne.
Son conseil d'administration l'a placé sous la protection de la loi des faillites, clouant le cercueil de la première importante victime américaine de la crise de la dette souveraine en Europe.
Plus largement, cette crise qui n'en finit pas de rebondir, encore lundi avec la décision grecque d'organiser un référendum sur l'accord européen de la semaine dernière, pousse chaque fois plus les banques vers des horizons incertains, auxquels elles se préparent en taillant dans leurs effectifs.
Depuis cet été, ce sont des milliers de salariés du secteur financier qui s'apprêtent à débarrasser leurs bureaux.
Mardi, la plus grande banque danoise, Danske Bank, a annoncé prévoir 2.000 suppressions emplois dans le cadre d'un programme de réduction de ses dépenses de 10%, sur trois ans.
"Nos résultats sont affectés par la crise financière, par les nouvelles règles financières et par des coûts de financement élevés", selon un communiqué.
La deuxième banque helvétique Credit Suisse a aussi annoncé mardi la suppression d'environ 1.500 postes supplémentaires.
Ce ne sont que les deux derniers noms d'une longue liste qui s'égrenne depuis des mois sur laquelle apparaissent Bank of America, Société Générale, Nordea, HSBC, ABN Amro, Lloyds...
Outre la nécessité de se préparer à un environnement hostile, un des éléments qui explique ces coupes "est très clairement la contraction de la sphère financière depuis la crise des subprimes en 2007. Aujourd'hui, il y a beaucoup moins de volume sur les marchés, globalement", explique Christian Parisot, économiste chez Aurel BGC.
"Les banques réduisent la voilure pour des raisons de prise de risque", analyse-t-il, ajoutant que ce sont des pans entiers de l'activité des banques qui sont sacrifiés. Ainsi les activités en compte propre pour la banque sont abandonnées afin de pouvoir tenir les obligations de ratio financier.
La décision grecque de convoquer un référendum va encore accentuer la pression, et fait souffler un vent de panique sur les marchés financiers mardi, qui éreinte en premier lieu les banques.
"Retour à la panique", préviennent les analystes de BNP-Paribas. Pour ceux de CM-CIC, elle "va contribuer à renforcer plus encore l?aversion au risque, risquant en effet de faire dérailler une large part du package mis en place pour crédibiliser la solvabilité de l?ensemble de la zone euro, et surtout de ses banques".
Tout le travail accompli depuis des semaines par les gouvernements européens, houspillés par les grands pays du globe, et l'accord obtenu in extremis la semaine dernière sur le fonds de secours européen ainsi que la décote de 50% imposée aux banques créancières de la Grèce, risque de se retrouver balayé, à la veille du G20 de Cannes.
Un "non" grec dans les urnes dévoilerait les pires perspectives pour les banques: défaut pur et simple, ou encore sortie de la Grèce de la zone euro.
Tous les calculs sur la recapitalisation des banques réalisés jusqu'ici se retrouveraient caducs, contraignant les établissements financiers à des efforts supplémentaires, au risque de restreindre l'accès au crédit pour l'économie réelle, accentuant les risque de récession.
Le lobby bancaire international IIF a refusé de commenter la décision grecque.
"Le risque, c'est qu'on s'achemine vers un défaut à 100% de la dette grecque", estime M. Parisot.
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