jeudi 24 février 2011

Copiepresse vs Google ...

19:17 - 23 février 2011 par Michel Lauwers

Google plaide le "fair use" contre Copiepresse


Premières plaidoiries à la cour d'appel de Bruxelles dans l'affaire opposant le moteur de recherches américain aux éditeurs francophones belges.

Quatre ans presque jour pour jour après sa condamnation en première instance pour violation de la loi sur le droit d’auteur, Google Inc s’est retrouvé ce matin au tribunal à Bruxelles face à Copiepresse, l’organisation fédérant les éditeurs de la presse quotidienne francophone et germanophone belge.

Les avocats du moteur de recherche américain ont ouvert le feu des plaidoiries en appel. Ceux de Copiepresse ainsi que de la SAJ (société de droit d’auteur des journalistes) et d’Assucopie (société gérant les droits des auteurs de livres scolaires et scientifiques), qui s’étaient joints à la cause, suivront le 14 mars prochain.

Rétroactes

L’origine de l’affaire remonte à janvier 2006, lorsque le groupe de Mountain View lance Google News en Belgique. Constatant que des titres et extraits d’articles de leurs journaux étaient reproduits sur ce site sans autorisation de leur part, les éditeurs francophones belges avaient lancé une action en cessation contre Google. Au tribunal en février 2007, le groupe américain avait été condamné à cesser de reproduire sur Google News des contenus des éditeurs membres de Copiepresse ainsi qu’à empêcher l’accès en cache de ces contenus (archives) sur Google Search.

Jugement assorti d’une astreinte de 25.000 euros par jour de retard dans le retrait des contenus litigieux.

Depuis lors, les deux parties ont pris contact et tenté de négocier un accord, sans résultat. Copiepresse a aussi lancé, en mai 2008, une action en dommages et intérêts contre Google. Elle estime le dommage subi par les éditeurs, du fait du référencement non autorisé d’articles en 2006 et 2007, entre 32 et 49 millions d’euros.

Hier comme en 2007, les conseils de Google ont plaidé l’application du droit du pays d’origine, et notamment du principe du "fair use" en vigueur dans le droit d’outre-Atlantique et qui autorise de larges exceptions au droit d’auteur. Ils ont cité un jugement rendu en France dans l’affaire SAIF (Société des auteurs des arts visuels) contre Google qui, en première instance en 2008, avait validé l’application du droit US.

Dans le dossier Copiepresse, celui-ci s’appliquerait parce que toutes les activités en cause auraient été effectuées aux Etats-Unis. Y compris, donc, les copies d’extraits de la presse locale.

Ils ont également argué de l’utilisation, par les éditeurs belges, de fichiers "robot.txt", ces fichiers donnant une série d’informations et de commandes aux moteurs de recherche à l’œuvre sur le web: en y recourant, les éditeurs auraient tacitement donné le feu vert à Google pour en tirer des extraits.

Ses conseils ont par ailleurs évoqué le droit de citation, l’exception pour revue de presse, la liberté d’expression, sans oublier la directive européenne sur l’e-commerce. "Un jugement négatif menacerait tous les services de référencement, voire même causerait leur disparition", a dit un des avocats.

On rappellera que la problématique oppose ici deux conceptions très divergentes du droit d’auteur, l’"opt out" en vigueur aux Etats-Unis et l’"opt in" privilégié dans le droit d’auteur européen: le premier offre le retrait (de contenu) à la demande et, forcément, a posteriori tandis que le second requiert une autorisation préalable.

Avec, en arrière-fond, l’éternel débat sur la création de trafic vers les sites référencés (ou "pompés", selon les conceptions), opposée à la perte de recettes publicitaires et du contrôle du contenu par les éditeurs de presse.

Sauf rebondissement, le jugement d’appel pourrait intervenir avant l’été.

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