Krach éclair de Dexia
Krach éclair ou éclair de lucidité ? En tout cas, la valeur bancaire a plongé de 10,05 % ce matin à 2,03 euros, son niveau le plus bas depuis le 18 mars 2009. Au terme d'une séance mouvementée, le titre a réduit ses pertes à 3,15 %, dans des volumes d'échanges 2,35x supérieurs à leur moyenne annuelle.
Dexia avait encore récemment démontré sa capacité à faire table rase d'un passé ingrat. Le 28 mai dernier, la banque franco-belge s'était engagée à accélérer la cession de ses actifs à risque, au prix d'une charge exceptionnelle de 3,6 milliards d'euros et d'une révision à la baisse des résultats pour l'excercice 2011. Ce que le marché avait salué.
Mais au fil des rebondissements de la crise souveraine en zone euro, les investisseurs concentrent leurs craintes sur l'exposition de Dexia à la Grèce, de l'ordre de 5,4 milliards, toutes obligations gouvernementales et créances sur le secteur privé comprises. Un chiffre qui n'a rien d'inquiétant en soi mais qui poserait problème dans le cas d'un défaut d'Athènes, total ou partiel, volontaire ou non.
Et, comme à son accoutumée, Moody's a exacerbé ces inquiétudes, en pointant du doigt Dexia mercredi. L’agence d’évaluation financière a annoncé que l’examen qu’elle menait depuis fin mars sur la note de la banque franco-belge, susceptible d’être abaissée, prendra en compte son exposition à la dette grecque. N’écartant plus un défaut de paiement dans le chef d'Athènes, Moody’s mesurera notamment "l’incohérence potentielle qui pourrait exister entre un défaut ou une restructuration et les notes actuelles."
Concédons qu'avec une proportion d'actifs tangibles qui représente moins d'un pourcent du total des actifs, l'aptitude du groupe à absorber les pertes liées à l'exposition souveraine ainsi qu'aux obligations sous-souveraines semble maigre. Quant au ratio de solvabilité Tier 1, il apparaît certes comme solide au vu des normes de Bâle III mais mesurer la stabilité de la capitalisation d'un groupe sous le prisme réglemenatire reste pour de nombreux analystes un instrument biaisé (en excluant notamment l'impôt différé actif ou les pertes non réalisées).
D'autres courtiers estiment que Dexia pourrait parfaitement gérer l'impact direct d'une restructuration de la dette grecque. Ces derniers sont cependant préoccupés par les effets de contagion, alors que l'exposition du prêteur franco-belge au Portugal est aussi importante. Si le pays ibère devait lui aussi subir une restructuration de 50 %, le ratio de Dexia tomberait selon certaines prévisions à 9,8% en fin d'exercice 2011. Ce qui placerait la banque dans une situation encore plus fragile.
Précisons enfin que les dividendes en action distribués aujourd'hui peuvent amplifier la pression vendeuse sur le titre Dexia. Les actionnaires de Dexia reçoivent une nouvelle action propre pour 18 existantes. "Les investisseurs qui veulent rapidement du cash choisissent dans ce cas d'immédiatement encaisser ces titres", nous précisait un opérateur.
Le même opérateur nous faisait également remarquer que toutes les grandes enseignes financières européennes telles que Deutsche Bank, UBS ou Credit Suisse ont vendu leurs actions Dexia ce matin, dans des proportions élevées mais pas anormales. "Regardez comme les grands groupes se font de plus en plus de soucis sur ce qui se passera avec la Grèce. Et au cas où l’on passerait leurs portefeuilles à la loupe, ils jettent leurs plus petits homologues. Aujourd'hui, c’est le tour de Dexia."
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