L'Internet mobile illimité n'existait pas
L'actualité du moment, c'est la fin programmée de l'Internet mobile illimité, décrétée la semaine dernière par les patrons des opérateurs télécoms au congrès de l'Idate. "Nos clients consomment trop de données, c'est intenable", tonnent-ils. Dans ce contexte tendu, il est bon de rappeler que l'Internet mobile n'a jamais été totalement illimité.
L'Internet mobile est limité en portée. Les applications de P2P sont généralement bloquées. La voix sur IP vient seulement de se faire une petite place dans quelques offres. Beaucoup d'autres usages de l'Internet fixe (l'hébergement de serveur, par exemple) ne sont même pas imaginables, du fait de la taille des terminaux.
L'Internet mobile n'est pas davantage illimité en débit. La notion de connexion ralentie existait dès les premiers forfaits de l'iPhone, en 2007, et il y a toujours eu deux vitesses, avant et après le bridage. En Espagne, Vodafone évoque maintenant aux professionnels une vitesse maximale pendant 300 Mo, 1 Go ou 3 Go, mais le raisonnement est le même.
Dans le meilleur des cas, l'Internet mobile ne reste illimité qu'en durée. Est-ce suffisant pour le qualifier comme tel ? "Aucune offre est parfaitement illimitée", avait reconnu le secrétariat d'État au Commerce en septembre. "Les limitations en matière d'Internet mobile ne sont pas suffisamment visibles pour les consommateurs", avait même regretté Hervé Novelli.
10 euros pour 25 Mo en 2007
En fait, la notion d'illimité a toujours été très variable. En 2007, quelques mois avant la sortie de l'iPhone en France chez Orange, SFR lançait des offres comprenant de la navigation "illimitée" sur des sites Internet partenaires (Dailymotion, eBay, YouTube, Google Maps, MSN), assortie de 25 Mo de navigation sur tous les autres sites, pour 10 euros supplémentaires par mois ? Un rêve.
Aujourd'hui, la tendance serait plutôt à l'arrivée, pour les clients occasionnels, d'offres un peu moins chères comprenant une petite dose d'Internet, comme chez AT&T aux États-Unis. Avec l'affaire des surfacturations des clés 3G, dont legouvernement s'est saisi, le hors-forfait a mauvaise presse. Les opérateurs préfèrent les forfaits bloqués, et des seuils de données supplémentaires.
La conversion des clients à l'Internet mobile demeure fragile. La navigation sur le téléphone progresse, mais elle concerne encore moins d'un client sur deux. Il reste une masse d'utilisateurs considérable à convaincre d'acheter un nouveau terminal et de se réengager sur 24 mois. Avec des smartphones peu chers (Android est bien positionné)... et des forfaits attractifs.
Une offre d'abondance de Free
Dans ce dossier, un paramètre important joue : la concurrence. Les opérateurs ont tant manié le terme "illimité", car l'argument de vente est aussi puissant dans le mobile qu'il l'était dans le fixe. Les clients préfèrent même payer un peu plus cher pour ne pas craindre de passer en hors forfait, selon une étude de Sanford Bernstein. Y compris s'ils consomment peu.
Résultat, les opérateurs s'observent. Le patron de Vodafone concède qu'il redoute la concurrence des plus petits, qui s'accrocheraient à l'illimité. Aux États-Unis, Verizon tarde à suivre AT&T. Il propose des forfaits limités, mais garde un abonnement présenté comme illimité. Des prix différenciés selon le débit, comme cela se pratique dans le fixe, pourraient être introduits avec la 4G.
En France, SFR et Orange tirent dans le même sens. Mais il n'y a pas non plus de front commun car Free, devenu quatrième opérateur en début d'année, a promis des abonnements d'entrée et de milieu de gamme, ainsi qu'une offre d'abondance, avec un accès illimité et ouvert à Internet. S'il a le champ libre, il pourrait très bien refaire en 2012 le coup de l'ADSL en 2002.
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