mercredi 3 juillet 2013

Tendance brique .... en Belgique



07:30 - 03 juillet 2013 par Jean-Yves Klein


Crédits hypothécaires: les taux remontent… mais pas pour tout le monde


Le taux de référence belge à 10 ans est brutalement passé de 2% à 3%. Si ces 100 points de base acquis depuis début mai ne semblent pas devoir se répercuter sur les des carnets d’épargne, sur les crédits hypothécaires, en revanche, la hausse se fait déjà ressentir… En particulier pour les échéances longues. 

La fin du crédit bon marché?




Est-ce la fin du crédit bon marché? Et faut-il encore profiter de cette fenêtre de tir avant que le crédit ne devienne vraiment plus cher? En tout cas pour ce banquier de la place bruxelloise, les taux des crédits hypothécaires sont indiscutablement repartis à la hausse. "Nous avons augmenté de 10 centimes vendredi, après 5 centimes la semaine passée, 10 centimes la semaine d’avant et 6 centimes la semaine précédente. Mais comme vous le savez, les banques lissent les variations de l’OLO. En fait, mon plus bas et quand je dis plus bas c’est depuis 60 ans - remonte à juin 2012: 2,82% pour le 15 ans fixe par exemple. Aujourd’hui, je suis à 3,20%, c’est-à-dire le niveau de fin 2011".

La vérité, c’est que les banques ont surtout mis à profit la baisse des taux précédente pour engranger des marges. "Cela se compte en dizaines de centimes, et toutes les banques l’ont fait".

Ceci posé, la hausse des tarifs ne touche pas toutes les catégories de prêt de la même façon. "Ceux qui en prennent plein la figure pour l’instant, ce sont indéniablement les prêts à long terme. Notre 30 ans fixe va passer à 4,35%, soit 1% de plus qu’en juin 2012!, reprend le banquier. C’est pour cela que nous conseillons beaucoup le semi-fixe. Pour le 10-5-5, on est à 2,94%, un très bon taux. Et d’ici 10 ans, nos clients verront bien ce qui se passera. Leur situation aura évolué, ils pourront peut-être racheter leur prêt…"

De fait, les banques n’aiment pas prêter à long terme à un taux fixe, car "elles calculent leur rentabilité sur 7 ans, explique John Romain, d’ImmothekerMaintenant que les taux sont très bas et qu’ils ne peuvent donc que remonter, elles veulent se couvrir et préfèrent pousser leurs clients vers des échéances plus courtes ou du semi-fixe. Mais il faut quand même faire attention à votre budget: même si c’est dans dix ans, serez-vous capable de soutenir une hausse du taux?".

Yves Evenepoel, de Test-Achats, appelle aussi à la prudence concernant les taux variables. "N’oubliez pas que ce sont les taux variables aux Etats-Unis qui sont à l’origine de la crise. Même si les prêts hypothécaires sont encadrés par la loi en Belgique, on peut doubler les intérêts exigés et, pour peu que les salaires n’augmentent pas beaucoup parce que la crise persiste et parce qu’il y a peu d’inflation, un couple peut se retrouver en difficulté à la première révision, même si c’est après 10 ans. Les enfants qui grandissent, ce sont aussi les charges du couple qui augmentent".

En réalité, "seules les compagnies d’assurances peuvent encore offrir des taux intéressants à long terme, car leur funding est puisé dans la branche 21, et non dans les carnets d’épargne. Vous pourrez trouver du 30 ans fixe à 3,95% contre 4,74% chez les banques. Mais il y a peu d’assureurs sur le marché et ils n’affectent que peu de moyen au crédit hypothécaire: 100 ou 150 millions d’euros tout au plus", poursuit John Romain.

Selon les moyennes compilées par immotheker.be, depuis le plus bas de l’OLO touché le 8 mai (1,97%), le 25 ans fixe (avec conditions) est passé de 3,67% à 3,91% (+0,24%) alors que le 20 ans fixe n’a dans le même temps augmenté que de 0,20% à 3,75% et le 15 ans fixe, de 0,15% à 3,45%.

Une hausse marquée certes, mais qui reste donc relativement modeste: au pire, les banques n’ont répercuté qu’un quart environ de la hausse de l’OLO jusqu’à présent.

Et concentrée sur les échéances longues, avec une différence de 0,40% entre le 25 ans fixe et le 30 ans fixe.

Yves Evenepoel tempère: "Vous pouvez trouver du 30 ans fixe à 3,95% aujourd’hui contre 3,70% en juillet 2012. Et en moyenne, les taux que nous répertorions sont en hausse de 0,20%. Donc oui, ça monte, mais les taux sont encore extrêmement bas dans une perspective historique".


Les profils qui rient et ceux qui pleurent


Le profil des emprunteurs a-t-il changé ? "Beaucoup, s’étonne notre banquier bruxellois.Je n’ai pratiquement plus de jeune qui vient acheter son premier logement. Avant j’avais 2 logements pour 1 investissement. Aujourd’hui c’est l’inverse car les gens qui ont un peu d’argent ne savent plus où le placer. J’ai aussi énormément de Français qui achètent des maisons à prix d’or du côté du Châtelain. Et ce ne sont plus des exilés fiscaux pur jus qui viennent avec leur magot, mais plutôt des entrepreneurs qui créent de l’emploi et qui déménagent en Belgique". Et qui empruntent donc.

Quant au "petit jeune", on peut dire qu’il est carrément mis sur la touche. "Depuis février, on ne peut plus prêter pour les frais de notaire, ce que nous faisions régulièrement avant, par exemple via un prêt à tempérament. Même si le profil et le revenu sont excellents, on ne peut plus l’accorder. BNP Paribas est plus strict encore: pas de prêt de plus de 15 ans pour une maison de rapport. Et, pour un logement, il doit rester 1.250 euros dans la poche de l’emprunteur, ce qui est très difficile pour nombre d’entre eux".

Une tendance que confirme immotheker.be. "Oui, les conditions sont encore plus strictes. Emprunter 100% de la somme est de plus en plus un problème. Ou alors il faut des garanties sur 10 ou 15% du montant".

Les "investisseurs", s’ils sont peut-être plus nombreux dans (les beaux quartiers de) la capitale, ne constitueraient toutefois que 15% des dossiers des prêts à l’échelle nationale.

Et la formule ne convient d’ailleurs pas forcément à toutes les catégories d’âge. "Vous savez, il y a des gens de 55 ou 60 ans qui viennent me trouver pour un investissement. Mais ils doivent bien se rendre compte qu’avec 15% de frais de notaire, il faut 3% de plus-value par an pour amortir ces frais sur 5 ans. Si la plus-value n’est pas au rendez-vous et que la situation économique se dégrade, gare aux mauvaises surprises... Et puis il faut bien penser au coût que représente un investissement immobilier lors d’une succession, si on se place d’un point de vue patrimoine familial global", pointe John Romain.

Est-il devenu plus difficile de négocier son prêt ? "Pas du tout, on négocie toujours aussi facilement… mais quand on est en position de le faire. Ce qui a changé c’est l’appréciation du risque par les banques", selon le banquier. "Depuis la crise, les banques ont très fort segmenté le marché: il n’était plus possible d’accorder les mêmes prêts à tout le monde, explique John Romain. Mais sous les taux plancher, il y a toujours les taux cave dont jouissent 6% des acheteurs parce que toute leur famille a du bien dans la même banque. Pour eux, rien n’a changé: si l’an passé ils avaient droit à du 3,50%, aujourd’hui ils ont toujours du 3,50%". Quant à la position officielle des banques belges sur les prêts hypothécaires, elle ne nous apprend strictement rien si ce n’est qu’elles "suivent de près l’évolution des taux".


Pression sur les prix ?


Selon les études, une hausse de 1% des taux des prêts hypothécaires entraînerait une baisse de… 5 à 7% des prix des habitations. Voilà qui, en théorie du moins, devrait exercer une sérieuse pression sur les prix de ce marché belge qui a pourtant l’air de résister à toutes les "intempéries". Mais d’une part la corrélation avec l’évolution de l’OL0 n’est pas si forte qu’on ne pourrait le penser et, en outre, "on ne va pas voir cette force s’exercer tout de suite car il y a assez de funding dans le pays. Il y a bien un peu de fonds qui s’en vont aux Pays-Bas via Rabobank ou en France via BNP Paribas mais les carnets croulent toujours sous l’épargne des Belges et ceux-ci sont parvenus à maintenir leur taux d’épargne au niveau exceptionnel de 15,50% de leurs revenus disponibles", relève John Romain.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire