vendredi 21 septembre 2012

I had a dream ...


Apple Store: les raisons de la colère

Depuis plusieurs semaines, la grogne monte chez les salariés de la filiale Apple Retail. Salaires, conditions de travail, management... les salariés français menacent le lancement du nouvel opus: l'iPhone5. Témoignage d'un vendeur de l'Apple Store Opéra à Paris

Par Tiphaine Thuillier pour LEntreprise.com, publié le , mis à jour le 
Depuis plusieurs semaines, la grogne monte dans les Apple Store français. Salaires, conditions de travail, management... les salariés français menacent le lancement du nouvel opus: l'iPhone5.
Depuis plusieurs semaines, la grogne monte dans les Apple Store français. Salaires, conditions de travail, management... les salariés français menacent le lancement du nouvel opus: l'iPhone5.
D.R.
La grogne sociale monte dans les magasins Apple. Depuis quelques jours, certains vendeurs portent au poignet un bracelet en plastique vert avec un simple mot : " Believe " (" Croire " en anglais) inscrit dessus, en référence aux promesses de la direction "qu'il convient de croire". Une manifestation discrète, difficile à répérer pour les clients. Mais symbole d'un ras-le-bol croissant chez les salariés des 13 boutiques françaises. David* travaille au flagship (le vaisseau amiral de la marque) de la place de l'Opéra à Paris depuis deux ans. Et, pour lui, porter ce bracelet a du sens.

Des employés inquiets et divisés

" Il s'agit de montrer à nos managers, à la hiérarchie, notre implication dans ce mouvement " raconte le jeune homme. Pourtant, à quelques heures du lancement de l'iPhone5, un événement très attendu et très orchestré médiatiquement, la menace d'une grève aurait de quoi gâcher l'ambiance... " J'en rêve, confie David qui découvrira le produit en même temps que les clients. Mais ce sera très compliqué à mettre sur pied car les employés sont divisés et beaucoup craignent d'exprimer leurs revendications, pratique peu appréciée dans l'entreprise. " Ces prétentions n'ont pourtant rien d'un caprice. Au contraire. Les salariés des Apple Stores français réclament une augmentation de salaire, la mise en place d'une grille salariale et des horaires moins fragmentés.

Pas d'avantage salarial mais un bon de réduction

" Dans un magasin, les salaires peuvent aller du simple au double. Tout dépend de ce que tu annonces à l'entretien, raconte le vendeur. Le palier minimum stagne à 19 000 euros bruts par an (soit 1260 euros net par mois) ce qui est très bas lorsqu'on vit à Paris. Moi, je suis à 23 000 euros bruts par an. Et sans le moindre avantage : ni ticket restaurants, ni treizième mois, ni prime de participation ou d'intéressement. Ah si, on a des avantages sur les produits avec, par exemple, 27 % de réduction pour acheter un ordinateur par an...Mais le plus injuste à mes yeux, c'est l'absence de grille salariale, l'opacité totale qui règne dans cette boîte. "

La parole de la "secte" Apple

Apple, première capitalisation boursière, n'est pourtant pas vraiment dans le besoin. Le contraste avec la précarité de certains de ses vendeurs étonne donc. " Quand il s'agit de vendre des téléphones ou des iPad nous faisons partie de la grande famille Apple mais quand on parle salaires, on nous répond que notre filiale est déficitaire ", commente David, amer.
En effet, les salariés des magasins dépendent d'Apple Retail France, une filiale du groupe, déficitaire. L'an dernier, elle affichait une perte de 10 millions d'euros. " On nous oppose cet argument-là et on nous pousse à vendre toujours plus de produits pour combler ces pertes mais on en a marre. " Le mouvement a commencé dans le magasin du Louvre. Visiblement, il serait venu des Etats-Unis, il y a plusieurs mois. Il en a eu vent par Twitter et certains sites de fans de la marque à la pomme où la parole des revenus de la " secte " Apple se libère. Car le dialogue n'est pas le point fort de l'entreprise. Impossible, par exemple, de trouver le contact des représentants syndicaux maison en effectuant une recherche dans Google !

Pression constante des managers

" D'après ce que je sais mais rien n'est clair et très compliqué à vérifier, les salariés américains, allemands et italiens auraient obtenu une hausse de salaire de 20% ", poursuit le jeune homme, fatigué de l'ambiance très " Big Brother " qu'il subit au quotidien. "On est sous-payés, bien sûr, mais on doit aussi badger sans arrêt, au bout de six minutes de retard, on reçoit un mail qui nous demande où nous sommes et les raisons de notre absence et puis il y a la pression constante des managers qui circulent dans le magasin, un iPad à la main pour vérifier en temps réel sur le planning que chacun est à son poste."

Trois mois et puis...

Arrivé dans l'entreprise " par admiration pour cette marque mythique et amour des produits ", David est aujourd'hui "écoeuré". " Les nouveaux venus déchantent au bout de trois mois. Enfin ceux qui restent parce que 7 candidats sur 10 sont virés pendant la période d'essai, lâche-t-il dans un sourire un peu dépité. Et la passion des produits, franchement, ça marche plus. Et cet iPhone 5 n'a rien de plus qu'un autre smartphone du marché. " Mais, vendredi, il devra retourner le vendre. " A reculons, précise-t-il, comme chaque jour où je vais travailler. " Car désormais, David, n'y croit plus...
*Le prénom a été modifié

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