mercredi 7 septembre 2011

Cash or not cash ?


09:07 - 07 septembre 2011 par Nadine Bollen

Emprunter va-t-il coûter plus cher?


Depuis des mois, on annonce une augmentation imminente des taux d'intérêt sur les crédits de logement. Les tarifs sont-ils vraiment à la hausse? Et cela signifie-t-il vraiment qu'emprunter pour une maison devient plus cher?
Fin 2010 et pendant la première moitié de 2011, un certain nombre de personnes ont anticipé leur décision d’achat d’une habitation par crainte d’une remontée des taux d’intérêt. Cette crainte était à coup sûr inspirée par la série ininterrompue de mises en garde quant à la fin prochaine de la période de taux du marché historiquement bas.
En jetant un coup d’œil sur les tarifs auxquels les banques proposent des crédits logement, il faut bien constater que le taux d’intérêt du marché a effectivement crû. Mais le taux des crédits hypothécaires a connu une évolution moins prononcée. Dans le même temps, l’inflation a explosé pour atteindre un pic de 3,75% en juillet. Dirk De Cort, chef économiste à l’Union Professionnelle du Crédit, estime dès lors que "le prix coûtant d’un crédit de logement est actuellement plutôt bas".

Des marges bénéficiaires plus serrées

Le taux d’intérêt sur les OLO belges à dix ans s’élevait en septembre 2010 à 2,8%. Début septembre 2011, il tourne autour des 4%, après un pic de 4,4% au mois d’août. "Alors que le taux du marché a gonflé de 1,2 point de pourcentage, le crédit à 20 ans et à taux fixe n’a renchéri que de 0,2 point", indique le courtier en crédit John Romain de chez Immotheker. "Les banques pouvaient se permettre de réduire leur marge bénéficiaire pour lever à bon marché de l’argent via les carnets d’épargne", explique-t-il. "De Cort a une autre explication pour le resserrement des marges bénéficiaires: "Les banques se focalisent davantage sur les marchés traditionnels, ce qui aiguise la concurrence." Stef Leunens, porte-parole de la KBC, confirme: "En raison d’une concurrence accrue, la marge de manœuvre est extrêmement réduite. Même si la marge intègre bien sûr une prime de risque, ce sont avant tout les taux du marché et le contexte concurrentiel qui influencent les tarifs."

Le prix réel est bas

La comparaison du taux d’intérêt demandé par les banques et du taux des OLO belges à dix ans jette une lumière sur la marge bénéficiaire prise par les banques sur les crédits qu’elles octroient. Le particulier qui souhaite estimer la cherté du crédit du logement en termes réels doit mettre en perspective le taux d’intérêt demandé par la banque par rapport à l’inflation. Celle-ci a connu un pic de 3,75% au mois de juillet. Le point haut serait désormais derrière nous: le Bureau du Plan prévoit une inflation de 3,4% pour l’ensemble de l’année 2011. Selon les chiffres d’Immotheker, un crédit de logement sur 20 ans à taux fixe coûte actuellement 4,15% en moyenne. Soit un coût réel de 0,75%, sans tenir compte des avantages fiscaux liés tous les ans à cette formule de financement.

Les banques plus sévères – ou pas vraiment?

Ainsi, on se trouve dans une situation de faibles marges bénéficiaires pour les banques et de taux d’intérêt réels peu élevés. Mais pour les candidats-acquéreurs, ce qui compte au final, c’est surtout le montant qu’ils auront à rembourser tous les mois. Pendant le premier semestre de cette année, une habitation coûtait en moyenne 213.000 euros. Pour emprunter la totalité de cette somme sur 20 ans à un taux d’intérêt fixe de 4,15%, il faut rembourser tous les mois 1.299 euros. Si l’on tient compte de la "règle d’or" selon laquelle le remboursement mensuel ne peut pas être supérieur à 1/3 des revenus mensuels, cette formule de financement est réservée aux ménages dont le revenu mensuel net est égal ou supérieur à 3.900 euros.
"Le nombre de personnes désireuses d’acheter ne diminue pas. Par contre, le nombre de candidats-acheteurs capables de le faire se réduit", précise Mathieu Verwilghen du réseau de courtage Century21. "Les grandes banques surtout sont moins enclines à prendre des risques lors de l’octroi de crédits. C’est ainsi que – dans certaines régions et pour certaines catégories de la population, il est vrai – nous voyons jusqu’à 40% de refus des demandes de crédit ", ajoute-t-il. Iain Cook, du réseau de courtiers ERA, estime lui aussi que les banques se montrent aujourd’hui plus sévères dans l’octroi de crédits. "Le temps où elles étaient disposées à financer jusqu’à 120% du prix d’achat est révolu. Actuellement, les banques accordent des crédits à hauteur de 80% du prix d’achat. L’acquisition d’une maison nécessite donc un apport propre plus important."
Les banques, quant à elles, nient qu’elles seraient devenues plus sévères. "Nous n’avons pas changé en termes de sévérité, ni de souplesse d’ailleurs. Chaque dossier de crédit fait l’objet d’une analyse individuelle. Le point le plus important est la capacité de remboursement des emprunteurs", réagit Hilde Junius, porte-parole de BNP Paribas Fortis. Son collègue Stef Leunens, de la KBC, ne dit pas autre chose: "Nous n’avons pas modifié nos critères et nous ne les appliquons pas de manière plus stricte. En principe, nous prêtons jusqu’à 110%, de sorte que les personnes intéressées puissent emprunter l’intégralité du montant lié directement à leur projet immobilier, et cela sans augmentation du tarif. Dans chaque décision d’octroi de crédit, la capacité de remboursement du client reste le premier critère." Dirk De Cort, de l’UPC, abonde dans le même sens: "La Bank Lending Survey établie tous les mois par la Banque nationale de Belgique montre que les conditions d’octroi sont stables depuis 7 à 8 trimestres déjà."

Plus que jamais la bouteille à l’encre

Si la plupart des emprunteurs considèrent avant tout le montant du remboursement mensuel, ce dernier en dit davantage sur l’accessibilité de la propriété résidentielle que sur le prix du crédit. Comment ce prix évoluera-t-il au cours des prochains mois? Une chose est sûre: on s’attend à un recul de l’inflation. "Tant que le taux sur les livrets d’épargne reste bas, je ne vois pas de motif de hausse pour le taux hypothécaire", affirme John Romain. Dirk De Cort se montre plus prudent: "Nous avons rarement connu un contexte aussi peu prévisible qu’aujourd’hui, que ce soit dans la sphère économique, le domaine financier et monétaire ou la sphère politique – sur le plan national aussi bien qu’international. Dans ces conditions, c’est pour ainsi dire la bouteille à l’encre concernant les prévisions sur l’orientation du taux du marché."
Et les banques, qu’en disent-elles? "À court terme, il n’y a pas de véritables changements en perspective", indique Miek Van den Wyngaert, porte-parole de Dexia. "Nous avons réduit nos taux hypothécaires au 1er septembre. Toutefois, le taux du marché est dans une tendance haussière à plus long terme. Cela se traduira par des taux d’intérêt plus élevés sur les crédits de logement", affirme quant à elle Hilde Junius, porte-parole de BNP Paribas Fortis. Nous laisserons le mot de la fin à son collègue Stef Leunens, de la KBC: "Ces dernières semaines, le taux du marché a grimpé alors que les tarifs des crédits de logement ont baissé. Entre-temps, cette situation s’est modifiée, et les tarifs des crédits de logement partent eux aussi à la hausse."

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